Bénin Science

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jeudi 16 avril 2015

Un antibiotique efficace et contre la résistance des microbes découvert

Un antibiotique  efficace et contre la résistance des microbes découvert

Un antibiotique très prometteur pour le traitement des agents pathogènes résistants aux médicaments vient d’être découvert  dans un  terrain herbeux boueux, par une équipe de chercheurs.

Cet antibiotique, nommé teixobactin, est  efficace contre la bactérie mortelle SARM (Staphylococcus aureus résistant à la méticilline) chez la souris et chez beaucoup d'autres agents pathogènes en milieux cellulaires. Mais son efficacité reste à être testée sur des humains.
Les résultats probants d’efficacité de l’antibiotique contre les microbes ont été publiés dans la revue Nature, au début de l’année (7 Janvier).
Les chercheurs, travaillant au département de biologie de Northeastern University de Boston, aux Etats-Unis d’Amérique ont découvert cet antibiotique en utilisant une simple méthode qui permet aux bactéries de se sentir chez eux dans le laboratoire.
La plupart des antibiotiques disponibles sur le marché ont été découverts grâce au dépistage du sol permettant aux bactéries mûres de tuer leurs concurrents. Mais seule une petite proportion de bactéries isolées au sol arrive à véritablement grandir en laboratoire dans des conditions normales de culture pour permettre de développer de nouveaux médicaments.
Kim Lewis, du Centre de découverte antimicrobienne de Northeastern University de Boston et auteur principal de l’étude et son équipe, ont donc trouvé une nouvelle méthode basée sur un dispositif appelé « iChip » qui permet aux bactéries de grandir normalement en laboratoire comme dans leur milieu naturel et ainsi aboutir à la découverte des bactéries capables de produire naturellement des composés mortels à d'autres agents pathogènes.
Grâce à ce dispositif, environ 50 % des microbes sont capables de croitre en laboratoire contre 1 % en l’absence de cet outil. 
Ce dispositif a été utilisé pour dépister 50 000 types de bactéries vivant dans le sol et les différents tests menés sur 10 000 colonies bactériennes ont abouti à 25 antibiotiques potentiels dont teixobactin est le plus prometteur, disent les chercheurs dans leur étude.
« Cette découverte est une révolution dans la lutte contre les bactéries multirésistantes », a déclaré Lamine Saïd Baba-Moussa, chercheur au département de biochimie et Biologie cellulaire, de la Faculté des Sciences et Techniques  (FAST), de l’Université d’Abomey-Calavi (UAC), au Bénin.

Un espoir pour éradiquer la tuberculose

Parmi les bactéries tuées par teixobactin figure Mycobacterium tuberculosis provoquant la tuberculose.
La tuberculose est l’une des  principales causes de décès en Afrique. Même si l'objectif du Millénaire pour le développement qui consiste à inverser la tendance de l’épidémie de tuberculose d’ici 2015 a été atteint, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), le recul de la morbidité et la mortalité dues à la maladie n’est pas encore assuré dans beaucoup de pays africains.
Baba-Moussa affirme que la découverte de cet antibiotique offre un grand espoir pour l’éradication de la tuberculose et bien d’autres affections telles que l’Ulcère de buruli.
Selon le chercheur, les études réalisées au Bénin sur cette maladie, montrent la résistance des bactéries (Mycobacterium ulcerans et  Staphylococcus aureus) aux antibiotiques (méthicilline)  compliquant parfois les traitements.
« Avec ce nouvel antibiotique, on pourra lutter contre plusieurs germes à la fois. Cet antibiotique sera surtout d’un grand renfort dans la lutte contre les bactéries résistantes aux céphalosporines de troisième génération ». Mais le chercheur estime que la seule condition pour arriver à ce résultat est que le coût du médicament soit abordable pour les populations africaines.

Parade contre la résistance des microbes

Les microbes développent de plus en plus de la résistance aux antibiotiques et cela suscite des inquiétudes à travers le monde.  La résistance aux antibiotiques s’accroît dans des proportions inquiétantes alors que le rythme de développement de nouveaux antibiotiques ralenti. 
En 2014, l'OMS a tiré la sonnette d'alarme sur les dangers de la résistance des microbes aux antibiotiques qui pourraient entraîner l’insuffisance « des ressources thérapeutiques disponibles pour traiter certaines maladies infectieuses ».
Selon Baba-Moussa, l’augmentation des bactéries multi-résistantes dans les pays africains est due aux traitements antibiotiques souvent mis en place sans un diagnostic approfondi du germe mis en cause au regard du  coût des analyses nécessaires.
« Le prix élevé des antibiotiques vendus dans les officines poussent les africains à se tourner vers les médicaments de la rue qui sont non seulement mal conservés, mais surtout de contrefaçons. Ces médicaments sont parfois sans principes actifs ou pour la plupart mal dosés. Aussi, l’usage abusif des plantes médicinales constitue un danger car ces plantes en réalité contiennent des principes actifs. Elles sont utilisées avec des posologies arbitraires sans aucune base scientifique. Tout ceci favorise le développement des bactéries multirésistantes. Pendant longtemps, les bactéries multirésistantes étaient observées essentiellement en milieu hospitalier mais aujourd’hui, il en existe beaucoup d’origine communautaire », a expliqué Baba-Moussa à SciDev.Net.
L’antibiotique Teixobactin constitue une nouvelle parade contre cette situation de résistance. Lewis en est certain : il a déclaré qu’il sera très difficile pour les microbes de développer une résistance contre cet antibiotique.  Son équipe et lui pensent que si teixobactin est utilisé pour traiter les hommes, il faudrait au moins 30 ans pour que les bactéries développent une résistance.
« La découverte de cet antibiotique est donc salvatrice pour la santé humaine », a déclaré Baba-Moussa.
Natacha Nouwakpo, pédiatre à l’hôpital de zone d’Akpakpa, à Cotonou, au Bénin a, pour sa part, déclaré que la découverte est intéressante mais, elle pense que ce n’est pas une molécule  miracle qui réglerait les problèmes en Afrique. 
« Les nouvelles bactéries résultent de notre mauvais usage des antibiotiques existant », estime Nouwakpo, qui a laissé entendre que l'usage des antibiotiques est malheureusement abusif en Afrique et une absence de prise de conscience est préjudiciable pour la santé.



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